Attention, il faut connaître vaguement les règles du bridge. Pour les non-initiés, une partie de bridge commence par des "annonces" codées, au cours duquel on décide du nombre de levées que l'un des camps doit réaliser. Ces annonces, autrefois orales, se font aujourd'hui en posant sur la table des "cartons d'enchères". Précisons que si l'on n'a pas de jeu, on dit "passe", et que pour "faire une enchère" il faut un certain nombre de points, constitués par des grosses cartes (As, Roi,Dame, Valet).
Tosca,
version bridgeurs :
(Humble
hommage à Victor Mollo…)
Je viens de visionner l’opéra de Puccini « Tosca »
dans la mise en scène de Zeffirelli, au Metropolitan de New York en 1985.
Evidemment, fabuleux. Même si on a du mal à oublier Maria Callas…
Mais j’ai fait une découverte (ou plutôt, c’est Sami qui m’a
fait cette suggestion, gardons-lui les droits d’auteur !) : « Tosca »
est un opéra pour bridgeurs. Eh oui ! Mais pour bridgeurs à l’esprit tordu…
Examinons : ils sont quatre protagonistes : la
cantatrice Tosca, son amant le peintre Mario, le méchant Scarpia et le rebelle
poursuivi, Angelotti. Dans l’histoire, les quatre meurent !
► Nord, donneur : Angelotti : poursuivi, il se
suicide avant l’arrivée des gardes. Ici, il est donneur, il arrive en retard,
essoufflé, regarde rapidement ses cartes, et il passe. Exit.
► Est, Scarpia : là, c’est plus compliqué, il est tué par
Tosca, qui feint d’accepter de se donner à lui pour épargner Mario. En tant que
bridgeur, il sort le carton « passe », le pose, regarde à nouveau ses
cartes et dit « non, pardon, je voulais dire… » et il met la main sur
une enchère. Les adversaires refusent : si l’on peut reprendre une enchère
erronée, genre « 1 Cœur, non, pardon, je voulais mettre 1 Pique », le
fait de passer puis de mettre une enchère est un « changement d’intention »,
on n’a pas vu un As, ou on n’a pas vu que l’on avait 6 Cœurs ou 6 Piques, donc
un 2 faible, etc… Là, cela donne un renseignement au partenaire. Les
adversaires, donc, protestent, et Tosca, pour arrêter la discussion, appelle l’arbitre.
Celui-ci signale que l’enchère « Passe » ne peut être changée, et que
la partenaire de Scarpia (ici Tosca) ne peut tenir compte de l’intention de
changer.
► Sud, Mario : il est exécuté sur l’ordre de Scarpia. Ici,
il se dit « tiens, l’autre a donc du jeu ». Il a l’ouverture, mais
une main plate, il feint l’indifférence et passe, attendant de voir, se disant
que les adversaires risquent d’empailler une manche ou de ne pouvoir faire le
compte des mains…
► Ouest, Tosca : se jette du haut des murs en constatant
la mort de Mario. À la table, elle se dit qu’elle a peut-être fait une bêtise
en appelant l’arbitre. Elle a un peu de jeu, elle pourrait ouvrir, mais « ne
doit pas tenir compte du fait que son partenaire voulait ouvrir ».
Apparemment, ils ont quelque chose à jouer, mais est-ce qu’il a planqué un As,
donc a 13-14 points, et ils ont une manche à jouer, ou une carte à Cœur ou à
Pique, dans ce cas il a un 2 faible, et il y a une partielle, mais on risque de
donner aux adversaires l’occasion de parler… Et est-ce que l’un des adversaires
n’a pas commis une erreur (Angelotti n’a pas pris le temps d’examiner son jeu),
ou est-ce que Mario lui joue comme d’habitude un tour de cochon ? Elle a
beau lui faire du pied sous la table, elle ne trouve pas la solution. Tant pis,
je passe !
►► Quatre « passe »… Et en fait, une moyenne !
Parce que la donne est telle que c’est celui qui joue qui chute…
Je laisse aux experts le soin de bâtir une donne
correspondant à l’anecdote…
Maria Callas dans Tosca, Londres 1964